29.8.07

La rénovation, Tribune de B. Poignant, député européen PSE

Excellente tribune signée B. Poignant qui resitue bien l'enjeu du travail à mener à gauche. Enfin un esprit clair! A lire absolument avant La Rochelle.

Le Parti communiste a connu lui aussi ses tentatives de relance : reconstructeurs avec Marcel Rigout, rénovateurs avec Pierre Juquin, refondateurs avec Charles Fiterman. Tout cela pour finir avec les 1,93% de Marie-George Buffet le 22 avril 2007. Il ne faut donc pas suivre son exemple et se montrer ouvert aux évolutions nécessaires.

La droite a aussi connu cela après sa cuisante défaite de mai 1988. Ses rénovateurs sont sortis du bois avec le résultat que l'on connait. : Barzach disparue, DeVilliers marginalisé, Noir, Millon et Carignon ostracisés, Juppé retiré, exilé puis battu, Seguin éliminé du jeu, Toubon écarté...et Chirac toujours là, vainqueur en 2002.

Le Parti socialiste a déjà vécu quelques moments qui l'ont ébranlé. Après la défaite législative de 1978, Michel Rocard veut rénover mais c'est François Mitterrand qui sera élu le 10 mai 1981. Après la déroute législative de 1993, Michel Rocard prend les rênes avec la même intention mais c'est Lionel Jospin qui mènera la campagne en 1995 et gagnera en 1997. En 2002, son élimination après cinq ans d'exercice du pouvoir tétanise tout le monde. La division sur le traité européen en 2004 et 2005 fera le reste.

Au total, une seule refondation se sera révélée féconde : celle du Congrès d'Epinay en 1971. Elle suit la lourde défaite de juin 1968 aux élections législatives et l'absence de la gauche au second tour de l'élection présidentielle de juin 1969. Elle se fait avec le concours d'un « nouvel arrivant » dans la politique : François Mitterrand, onze fois ministre sous la IVème République et ancien membre du gouvernement de Guy Mollet de 1956-57. Comme quoi il faut se méfier du piège des mots. L'histoire ne se répète pas. Elle apporte quelques leçons et permet la distance.

Aujourd'hui, il est bon de faire un tour d'horizon de ce que les uns et les autres mettent derrière le mot "rénovation".

Certains se contenteraient de changer le Premier secrétaire : patience, François Hollande quitte sa fonction en 2008 ! D'autres veulent un renouvellement générationnel, mais la direction n'est pas si vieille que cela : il suffit de s'intéresser à nos secrétaires nationaux et on verra à l'écran beaucoup de têtes nouvelles ! Féminiser, diversifier avec les hommes et les femmes issus de l'immigration : tout cela peut se faire mais ne change pas la politique pour autant.

D’autres imaginent de changer le nom du Parti Socialiste. Il ne faut pas avoir honte de son étiquette. Les seuls qui ont changé leur nom à gauche sont plusieurs partis communistes pour s’appeler…. partis socialistes ou partis sociaux-démocrates.

Que peut-on alors entendre par rénovation ? Je vois quelques pistes utiles à emprunter, de nature idéologique politique et culturelle, avant d'être programmatique.

Un autre regard sur la mondialisation d'abord. Celle-ci est un fait du XXIème siècle. Elle reprend son cours historique ouvert au XVème siècle et interrompu entre 1914 et 1991 par deux guerres mondiales et une guerre froide jusqu’à la dissolution de l'Union soviétique. Trop souvent à gauche, dans les esprits, cette mondialisation est perçue et même présentée comme la menace et le risque suprêmes. Dans ce cas la réaction est le repli et la peur, donc la fermeture et la frilosité. La mondialisation est certes un défi mais c’est aussi une nouvelle chance pour la France et l’Europe. Il faut être présent comme Pascal Lamy à l’Organisation Mondiale du Commerce et peut être Dominique Strauss Khan au Fonds Monétaire International.

Un comportement décomplexé face à l'extrême-gauche et aux associations qui s'en recommandent certainement. Trop longtemps les socialistes ont été culpabilisés par leurs voisins de gauche, communistes léninistes d'abord trotskystes aujourd'hui. Eux aussi ont besoin de se rénover, mais s'y refusent. Adressons-nous à leurs électeurs qui les choisissent mais soyons totalement nous-mêmes, réformistes, sociaux-démocrates, sociaux-libéraux même. Ils sont le passé. Soyons l'avenir.

Un engagement soutenu pour l'Europe ensuite. Les socialistes doivent rester un des fers de lance de la construction européenne. On ne peut pas devenir le "schtroumpf grognon" de l'Europe. Un traité constitutionnel nous a divisés. Le second traité doit nous réunir. Nous ne devons pas faire la fine bouche pour chaque avancée de l'Union. Si nous attendons l'Europe idéale, elle ne sera jamais là. Si chacun exige l'Europe de ses rêves, l'impuissance sera au bout du chemin. Le prochain rendez-vous sera le traité réformateur ou modificatif : je voudrais qu’aucun socialiste ne lui dise non.

Dédiaboliser le mot "libéral". L'extrême-gauche a réussi son coup : faire passer ce mot totalement à droite. Pourtant sa racine emprunte à "liberté". Oui nous sommes des libéraux sur les plans politique et culturel. Nous ne sommes certainement pas des "totalitaires", le pendant de cette expression. Nous sommes aussi des partisans de l'économie de marché, en ce sens des libéraux. Nous ne sommes pas des ultra-libéraux qui cherchent à faire reculer l'Etat et toute institution sociale. Sur ces plans, ne rasons pas les murs et ne nous cachons pas.

Enfin, contribuons, par notre rénovation, à l'apaisement des rapports politiques. Les Français sont lassés des affrontements idéologiques voire dogmatiques. Ce fut une intuition de François Bayrou avant le 1er tour des présidentielles : il suggérait même Dominique Strauss-Kahn comme Premier ministre. Ségolène Royal a suivi la même intuition entre les deux tours : elle n'excluait même pas François Bayrou comme Premier Ministre. Nicolas Sarkozy s'en est inspiré après son élection : Bernard Kouchner et quelques autres sont ainsi devenus ministres. Dans l'histoire de la France, il y a des moments à comprendre : en 1914, face à l'agression c'est l'Union sacrée ; en 1944 avec le Libération et pour la reconstruction c'est le tripartisme ; en 1958 devant la décolonisation et la guerre d'Algérie c'est le gaullisme et la SFIO même si certains refusent ; en 2007 (et même avant si Chirac l'avait voulu), face à la mondialisation, il y a comme une aspiration à l'entente nationale. Le Parti socialiste ne doit pas se fondre dans le piège de l'ouverture. Il doit avoir l'intelligence de comprendre la période.

Reste la question stratégique autour des alliances. L'extrême-gauche ne veut pas gouverner, au moins c'est clair. Le Parti Communiste va vivre ses dernières années. Les Verts ne décollent pas depuis trente ans. Certains radicaux sont tentés de rejoindre leurs frères de l'autre rive. Les amis de J.P. Chevènement ont un horizon restreint devant eux. Il y a deux solutions : ou le PS réussit à franchir la barre des 35% à lui seul ou il regarde d'autres alliés, notamment le Mouvement Démocrate. Il ne faut pas fermer la porte à condition de connaître la plateforme de ce parti aujourd'hui inexistant, de vérifier sa propre stratégie qui ne peut pas être tantôt l'UMP, tantôt le PS. Il faut choisir. Cette stratégie ne doit pas être à géométrie variable selon qu'il s'agisse d'élections nationales ou locales.

Faut-il changer la Déclaration de principes du Parti socialiste qui fonde l'adhésion de chacun de ses membres ? Ce fut fait il y a 20 ans. Fut alors abandonné la référence à l'appropriation collective des moyens de production et d'échange comme moyen pour aller vers le socialisme. Son caractère révolutionnaire a été atténué au profit de la phrase suivante qui figure toujours dans ce texte : "Le Parti socialiste met le réformisme au service des espérances révolutionnaires". On peut faire mieux mais l'économie de marché a été ce jour-là reconnue. Il nous faut un réformisme plus affiché et mieux assumé, un étatisme moins affirmé et moins systématique, une stratégie plus ouverte et moins exclusive.

Pour tout cela, il faut un parti qui ose faire abstraction du rythme des élections. Comme il y en a chaque année d’ici 2012, on trouvera de bonnes raisons de reporter notre « rénovation ».

Et puis, surtout, on ne peut tout de même pas demander à la Gauche d'être de Droite pour prix de sa modernisation.

25.8.07

Mettre en accord ses idées et son action

Bonjour à toutes et tous, sans cesse plus nombreux à lire Ambidextre! Plus que jamais nous avons besoin de débat. L'hyperprésidentialisme, l'omniprésence sarkozyste, les dérives UMP à Argenteuil notamment, les cafouillages sur les emprunts immobiliers ou la TVA sociale, la réforme à venir des institutions ou les errements de la gauche; les sujets d'échange et de débat ne manquent pas. Et Ambidextre est là!

Il n'est pas dans les habitudes de ce blog de servir de journal intime. Il n'a jamais été question dans faire le réceptacle de tous les états d'âme de ses auteurs. Mais la main gauche ressent, à l'heure de la rentrée des classes, au moment de remplir son cartable et d'affuter ses crayons de bois, l'irrépressible envie de vous dire sa fierté de pouvoir concilier bientôt ses idées et son action.

Dès le 10 septembre, je serai collaborateur de député au Palais-Boubon. Je vais enfin pouvoir mettre mon envie de politique, de débat, ma conviction que la politique peut faire changer les choses, au service de deux députés socialistes et participer, à mon niveau, forcément encore limité à quelques contributions, au travail de refondation de la gauche.
L'activisme politique du Président Sarkozy signifie que l'activité parlementaire va être extrêmement dense et que tous les textes ne pourront pas avoir l'examen sérieux et serein qu'ils mériteraient. Dans ce contexte, qui marque de la part du Président une tentative de "prise de vitesse" du Parlement, le travail de l'assistant parlementaire est crucial. C'est à lui qu'il revient de connaître les contenus des textes en discussion, de tenir informé son député des éventuelles modifications à venir, et d'anticiper les possibilités d'amendements ou les angles d'attaque permettant de formuler une critique constructive et des contre-propositions plus justes ou plus efficaces.
Derrière cette envie, derrière cette description rêvée, je ne doute pas bien évidemment qu'il existe aussi une réalité plus terre à terre, une réalité plus ingrate et des taches sans doute plus triviales pour l'assistant parlementaire. Mais je veux croire, qu'au contact d'élus de la nation, qu'à la lecture quotidienne des textes de lois, grâce à la compréhension progressive du fonctionnement même de l'Assemblée et de la politique nationale, je trouverai le moyen de parfaire mon apprentissage politique.
Qui sait; peut-être y trouverais-je aussi le moyen de structurer un peu mieux mes propres idées, le moyen aussi, par les rencontres et les échanges, de faire naître ma propre ambition.