2.10.08

Crise financière, terminus d'une ligne idéologique.

Ainsi donc, en ce début de mois d'octobre, les plus hautes autorités de l'Etat, Président de la République en tête, prennent enfin la mesure d'une crise financière qui a éclaté outre-Atlantique...en août 2007. Après des mois de communication gouvernementale digne du régime de Kim Jong-il, le gouvernement Fillon découvre que la crise financière ne s'arrêtera malheureusement pas à nos frontières. Les gouvernements passent mais la communication dite de "l'autruche" reste. On se souvient que le nuage radioactif de tchernobyl devait en son temps épargner la France...

La réalité est bien différente. Pas plus que la chaîne des Alpes n'a pu empêcher la pollution radioactive hier, la suffisance de la ministre de l'économie et des finances n'a pu empêcher la crise économique aujourd'hui. On ne croit plus depuis longtemps à l'absurde ritournelle qu'elle nous servait encore au mois de septembre.Aujourd'hui, la chanson préférée de Mme Lagarde, "ma petite entreprise connait pas la crise", ne fait plus guère recette. Les masques tombent et l'on s'érige soudain côté UMP en régulateurs d'une économie mondiale devenue folle. Sans raison ou presque.

Personne n'est dupe. Au-delà de ce changement de ton, officiellement acté avec le discours présidentiel de Toulon, la crise financière,la crise économique qu'elle va immanquablement engendrée, sont le produit d'un contexte international particulier et d'une politique économique précise. Si le contexte échappe en partie à la responsabilité de l'exécutif français, il doit aujourd'hui s'expliquer en revanche sur la politique imprévoyante conduite depuis plus d'un an. Les 15 milliards de TEPA ont été décidés alors que les analyses d'une crise à venir existaient déjà...

Il est trop facile d'en appeler, maintenant que la crise est là, à "l'unité nationale". De se réfugier dans une habile communication ; la gauche est sommée de faire taire ses critiques et de se rallier aux pyromanes d'hier pour combattre l'incendie.

C'est évidemment inacceptable.

Qui depuis des années maintenant, tient un langage constant en faveur de la régulation, du maintien d'un contrôle de la puissance publique sur les marchés ?

Qui a tenté de mettre en garde avec constance contre les dangers de la déréglementation ?

Qui dénonce depuis longtemps le mythe économique de "l'autorégulation" des marchés ?


Qui proposait la possibilité de recourir de manière ciblée à des "nationalisations temporaires" en cas de risques économiques majeurs ?

Le Parti socialiste, que l'on disait dépassé sur le terrain des idées, ne tient pas avec la crise financière et économique sa revanche. Quand on fait de la politique, on ne souhaite pas la crise à son pays pour démontrer que l'on avait raison contre l'idéologie dominante. Mais toute crise est porteuse de remises en question et d'opportunités de rebond.

La gauche n'acceptera pas de se laisser berner par la droite maintenant que la crise est là. L'éthique de responsabilité impose au gouvernement de répondre devant les Français de ses choix. Ces choix, la gauche ne les aurait pas fait. Voilà la vérité. L'"unité nationale" réclamée par Fillon n'a aucun sens en la matière. En France, la droite est majoritaire dans toutes les institutions de la République ; la situation politique n'est donc nullement comparable avec celle prévalant aux Etats-Unis.

Ce qu'il faut au pays, ce n'est pas l'unité nationale mais un débat national.Et ensuite, assumer ses choix politiques!!

La gauche doit rappeler avec force la pertinence de son discours. Les propositions du PS pour sortir la France de la crise ou l'en protéger sont prêtes.

1- créer un fonds de garantie des prêts permettant l’accès au crédit des PME et des ménages afin d’assurer leur rôle de distribution de liquidités à l’ensemble de l’économie.

2- soutenir l’investissement privé comme public, en modulant l’impôt sur les sociétés selon que le bénéfice est réinvesti ou que le bénéfice est distribué aux actionnaires.

Il est temps de rétablir certaines vérités politiques. Au milieu d'autres poncifs largement alimentés par les médias, la gauche et la droite seraient aujourd'hui devenus un clivage dépassé, entend-on trop souvent. C'est faux. Cette crise en est un puissant révélateur.

Je vous laisse juge et comptable des responsabilités. Mais juste pour rappel, et alors que la crise des "subprimes" a révélé toutes les perversités du système immobilier américain, voici ce qu'écrivait le très inspiré candidat Sarkozy en avril 2007 (abécédaire des propositions):

"Les ménages français sont aujourd’hui les moins endettés d'Europe. Or, une économie qui ne s'endette pas suffisamment, c'est une économie qui ne croit pas en l'avenir, qui doute de ses atouts, qui a peur du lendemain. C'est pour cette raison que je souhaite développer le crédit hypothécaire pour les ménages et que l'État intervienne pour garantir l'accès au crédit des personnes malades.
Je propose que ceux qui ont des rémunérations modestes puissent garantir leur emprunt par la valeur de leur logement.
Il faut réformer le crédit hypothécaire. Si le recours à l’hypothèque était plus facile, les banques se focaliseraient moins sur la capacité personnelle de remboursement de l’emprunteur et plus sur la valeur du bien hypothéqué. Ceci profiterait alors directement à tous ceux dont les revenus fluctuent, comme les intérimaires et de nombreux indépendants".

3 commentaires:

Anonyme a dit…

Je dis que tout cela est très très bien !
Il manque quelques autres propositions, sur la régulation financière et économique notamment, mais j'adhère !

Anonyme a dit…

I agree with you M. Ambidextre!good analysis!

Nicolas a dit…

Pour la régulation financière et économique, et me si cela n'est pas le rôle qui lui a été confié initialement, je crois que le FMI est bien placé...

L'interview de son directeur général, Dominique Strauss-Kahn, dans le JDD de dimanche dernier était de ce point de vue assez éclairante.

Je vous en livre un extrait qui montre le DG du FMI veut et peut agir!


"Et qui va mener cette réforme?

Le Fonds monétaire international peut le faire. Les gouvernements de la planète, tous les gouvernements, pas seulement ceux des pays riches, ont intérêt a se servir du FMI pour cela. Nous avons été créés en 1944 comme une sorte de service public mondial. Nous sommes les gardiens d'un bien public global: la stabilité financière, au service de l'économie. En 1944, ce qui menaçait, c'était l'anarchie monétaire. Aujourd'hui, il faut faire face, en plus, à l'anarchie financière: l'opacité, la cupidité, l'irresponsabilité d'un système qui s'est developpé sans rapport avec l'économie réelle... La finance doit être contrôlée. Nous sommes prêts à le faire si on nous en donne le mandat. Nous sommes dans notre rôle, et je le revendique.

Le FMI sera un gardien mondial des finances mondiales?
Il doit être le lieu de la discussion d'abord, de la décision ensuite. Sur l'analyse de la crise comme sur les normes qu'il faut adopter. On connaît les pistes: transparence des transactions et de l'évaluation des actifs; contrôle des rémunérations; évaluation des risques, notamment pour les fonds d'investissement. De même les agences de notation doivent être supervisées. C'est un devoir pour les puissances publiques de définir, au niveau international, des rêgles universelles de fonctionnement des marchés financiers..."

http://www.lejdd.fr/cmc/politique