14.2.06

Toc ! Toc ! C'est le plombier polonais !

N'ayez crainte, mesdemoiselles, vous ne devrez pas attendre vos prochaines vacances pour retrouver ce jeune et beau polonais sur ses terres. Lech (appelons-le ainsi car la notoriété de son illustre aîné syndicaliste nous assure que son prénom est ainsi typiquement polonais!), je reprends : Lech, plombier polonais, pourra très bientôt venir oeuvrer dans votre cuisine en toute légalité. En effet, la directive Bolkestein a enfin été adoptée par les députés européens après deux ans de débat houleux et un projet de constitution avorté. [Je ne sais pas d'ailleurs si la directive européenne relative à la libéralisation des services doit encore être nommée ainsi du nom du commissaire Bolkestein, qui doit aujourd'hui se sentir orphelin du texte initial dont il revendiquait la paternité.]


En bref, voici les explications nécessaires à la compréhension de mon post :
- le texte adopté ce soir est le fruit d'un consensus entre le PPE et le PSE. Dans le but d'une libéralisation du marché européen des services (après ceux des biens physiques, industriels et agricoles), il impose aux Etats membres d'assurer un libre accès à leur territoire aux prestataires de services des autres pays, avec la disparition d'obstacles jugés discriminatoires et disproportionnés. Cependant, il leur permet de restreindre l'accès à leur marché pour des raisons d'ordre public, de sécurité publique, de protection de l'environnement, de santé publique, de politique sociale et de protection des consommateurs.
- Ce texte est un compromis dans la mesure où le principe du "pays d'origine", aspect le plus critiqué du projet initial, n'y figure plus : Ce principe, décrié dans des pays comme la France et la Belgique, stipulait qu'un prestataire de services serait soumis à la seule loi de son pays d'établissement, pas à celle du pays d'accueil où il viendrait pour une mission temporaire.

Je me réjouis qu'une directive sur la libéralisation des services puisse enfin être adoptée. Il était temps. Cependant, mon optimisme reste limité.

Il s'agit d'un consensus relativement mou, qui ne témoigne pas d'une reprise de la dynamique de construction européenne et qui ne contente que peu de personnes. Il faut dire que le débat sur cette question est fortement clivé. Les passions se sont déchaînés et les "plombiers polonais" ont cristallisé toutes les peurs des altermondialistes, de l'extrême gauche et même au delà. Dans de telles circonstances, un simple consensus ne peut satisfaire personne. Les gauchistes ayant l'impression -horreur!- d'abdiquer devant le grand capital et les libéraux, de perdre toute l'essence du projet.


Je me rapproche de l'avis de ces derniers :

1/ Les partisans de la gauche craignaient principalement le dumping social. Dans les services, je pense le risque assez limité. Pourquoi ? Car quand nous parlons services, nous parlons d'hommes et de femmes et la mobilité du "travail" est au combien plus difficile que celle du "capital".

2/ Par ailleurs, pour un certain nombre de services, la France (puisque l'habitude est, quand nous étudions les politiques européennes, de les étudier au regard de nos propres intérêts franco-français) manque de main-d'oeuvre. C'est notamment le cas du BTP où certaines entreprises européennes seront ravies de pouvoir combler ce vide... A souligner tout de même, que même avec le principe du pays d'origine, un travailleur polonais comme Lech, qui viendrait individuellement en France, en dehors du cadre d'une entreprise polonaise aurait été soumis aux mêmes conditions d'embauche qu'un travailleur français (soumis au droit français du travail).

3/ Dernier point de mon argumentation -et pas des moindres- la France avait tout à gagner de la libéralisation des services et de la directive Bolkestein version 1. La structure de l'économie française est telle que les services sont parmi les premiers produits d'exportation de l'hexagone vers les autres pays de l'UE. Le secteur bancaire, les assurances, l'hôtellerie, le tourisme, le transport, la communication, les médias, les services aux collectivités, etc : dans tous ces secteurs d'avenir, à la main d'oeuvre souvent très qualifiée, les entreprises françaises brillent et n'avaient rien à craindre d'une telle libéralisation, au contraire.
Nos voisins hollandais, espagnols ou anglais, aux économies comparables à la nôtre, l'avaient bien compris... Aucune pitié pour leurs plombiers, me direz-vous !

3 commentaires:

Nicolas Vignolles a dit…

pas de commentaires ?
Qui ne dit mot consent !

Anonyme a dit…

Non, non... pas de commentaire.

plombier-urgent a dit…

faire la promotion du tourisme avec limage du plombier polonais cest amusant

Sophie