23.10.08

Critique de livres - Fondation Jean Jaurès



Source : www.decitre.fr


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Au commencement il y eut une crise des crédits hypothécaires à risque...

Victimes d'une bulle immobilière et d'un système de prêt particulièrement efficace en temps de croissance mais singulièrement cruel en tant de crise, des millions d'américains se retrouvent aujourd'hui sans logements. Cleveland, Ohio, est une terre sinistrée. Efficace, Marie-Paule Virard nous plonge d'emblée dans la réalité de cette ville désormais fantôme, au coeur des conséquences humaines et sociales de la crise des « subprimes ». C'est là le point de départ de la crise que nous vivons et d'une certaine manière le point d'arrivée d'une conception du capitalisme.

Le marché immobilier américain fut en effet le détonateur d'une crise globale du système financier. Encore faut-il comprendre cette crise originelle et en expliquer les raisons. A l'origine il y a une idée simple ; les logements sont un marché comme un autre sur lequel il est possible d'obtenir par le jeu spéculatif d'importants rendements. Chaque nouvel actif est un nouvel eldorado. Hier les valeurs Internet, aujourd'hui les valeurs immobilières, la philosophie est la même. On ne regarde plus les fondamentaux économiques mais si le rendement d'un actif sera plus ou moins élevé. Pourtant le marché immobilier a ses spécificités ; effet démultiplicateur ou aggravant, aux Etats-Unis, la capacité à s'endetter est liée à la valeur des biens. Ce que les économistes ont identifié comme étant « l'effet richesse » recèle de nombreux risques. Plus un bien prend de la valeur, plus on gagne, et plus on est autorisé et même invité à s'endetter...

Enfin, dernière perversité du système, les ménages se voient offrir une gamme élargie de crédits : à taux variable, hybrides ou « ballons », ceux-ci sont de véritables « bombes à retardement » en cas de retournement du marché immobilier. Bombes dont les effets sur les ménages sont aisément prévisibles : impossibilité de rembourser l'emprunt contracté, expulsion au bout de trois mois d'impayés, saisie du bien, chômage, etc... En 2006, les taux pratiqués aux Etats-Unis étaient compris entre 3 et 4 %, en août 2007, ils étaient de 16%.

La crise immobilière américaine aurait pu rester un problème « domestique » mais c'était oublier un peu vite le goût immodéré de la finance mondiale pour les crédits hypothécaires américains! Ainsi est-on passé d'un problème à priori circonscrit aux Etats-Unis à une contagion généralisée du monde financier et bancaire mondial. Elle s'explique en grande partie par les choix mimétiques des acteurs de la finance mondiale qui achètent au même moment les mêmes actifs que leurs voisins, préférant encourir le risque d'une chute collective à celui d'une chute isolée...


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15.10.08

La la la

Source : Spectacle, Benjamin Lazar



Quoi de plus indiqué en ces temps de crise et d'anxiété collective que de s'évader par la chanson et le théâtre ? Pas grand chose à mon sens, surtout lorsqu'un spectacle d'une rare fraicheur nous propose de réunir les deux sur une même scène. Hier soir donc, mardi 14 octobre, oubliant un instant mon goût immodéré pour les joutes footballistiques,j'ai préféré pendant 1h40 le théâtre Jean Vilard de Suresne aux tribunes du Stade de France.

Geoffroy Jourdain, à la tête du choeur de chambre Les Cris de Paris, traditionnellement plus habitué à la pratique de la musique contemporaine, et le metteur en scène Benjamin Lazar – spécialiste du théâtre et de l’opéra baroque – nous proposent un spectacle de "théâtre musical" particulièrement enthousiasmant. Sur scène, de jeunes artistes pétris d'énergie, revisitent et même revitalisent les grands standards de la musique populaire!

On rit et on prend un immense plaisir en passant de Prince et Madonna,à un autre tableau, où l'on entend chanté Dalida ou Julio Iglesias. Et tout cela a capella, par un groupe d'une quarantaine d'artistes, aussi justes dans leur jeu d'acteur que talentueux dans leur interprétation vocale.

Ce ne fut pas humour ou émotion mais humour et émotion! Il me reste par exemple ce tableau fabuleux ; une soirée entre adolescents qui tous fredonnent la musique de la boom, a capella,
Il me reste aussi les morceaux de disco et de musique électronique, les enchainements réussis et drôlatiques entre "Porque te vas" et Thomas Fersen, des Rita Mitsouko à Lou Reed...

"La la la", opéra en chansons, c'est du théâtre vivant et enthousiasmant.

Dommage que le théâtre soit encore trop cher. Hier j'étais invité, mais la place pour les autres spectateurs était de 12 euros, au moins 2,20 euros de plus que le tarif normal au cinéma...

9.10.08

Critique de livres - Fondation Jean-Jaurès

Critique de trois livres autour du monde ouvrier et de mai 68.

Extrait:

"Comme dans L’Etabli, on retrouve un monde d’inégalités profondes, de méfiance généralisée, symbolisée par la présence sur les chantiers de « mouchards ». Confrontés au déni quotidien de leurs droits élémentaires, les intérimaires ne peuvent mener aucune action collective de revendication du fait même de leur statut. Le statut, élément déterminant de différenciation et de discrimination sur les chantiers, se fonde sur deux éléments : la couleur de la peau et le type de contrat de travail. La couleur de votre peau, hier comme aujourd’hui – aujourd’hui de manière plus insidieuse qu’hier – demeure un élément de discrimination entre travailleurs omniprésent sur les chantiers. Mâtiné d’humour, le racisme structure et fige les relations de travail, les hiérarchies, les droits. Quant au type de contrat de travail, il est une sorte de seconde carte d’identité du travailleur ; c’est lui qui indique aujourd’hui la nature de son lien à l’entreprise, détermine la nature de ses droits, fixe le degré de considération et de dignité auquel il peut prétendre. Pire, ce que démontre l’enquête de Nicolas Jounin, c’est qu’il existe de la part de certaines entreprises une stratégie consciente d’exclusion des intérimaires de toutes formes de sécurité. Là encore, le statut prime ; d’un côté, les « embauchés » sont associés et bénéficient des règles de sécurité en vigueur dans « leurs » entreprises, de l’autre, les exécutants sous-traitants, intérimaires, sont renvoyés à leurs seules attributions de production. Passagers clandestins, ils se trouvent dépourvus de sécurités juridique et physique."


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2.10.08

Crise financière, terminus d'une ligne idéologique.

Ainsi donc, en ce début de mois d'octobre, les plus hautes autorités de l'Etat, Président de la République en tête, prennent enfin la mesure d'une crise financière qui a éclaté outre-Atlantique...en août 2007. Après des mois de communication gouvernementale digne du régime de Kim Jong-il, le gouvernement Fillon découvre que la crise financière ne s'arrêtera malheureusement pas à nos frontières. Les gouvernements passent mais la communication dite de "l'autruche" reste. On se souvient que le nuage radioactif de tchernobyl devait en son temps épargner la France...

La réalité est bien différente. Pas plus que la chaîne des Alpes n'a pu empêcher la pollution radioactive hier, la suffisance de la ministre de l'économie et des finances n'a pu empêcher la crise économique aujourd'hui. On ne croit plus depuis longtemps à l'absurde ritournelle qu'elle nous servait encore au mois de septembre.Aujourd'hui, la chanson préférée de Mme Lagarde, "ma petite entreprise connait pas la crise", ne fait plus guère recette. Les masques tombent et l'on s'érige soudain côté UMP en régulateurs d'une économie mondiale devenue folle. Sans raison ou presque.

Personne n'est dupe. Au-delà de ce changement de ton, officiellement acté avec le discours présidentiel de Toulon, la crise financière,la crise économique qu'elle va immanquablement engendrée, sont le produit d'un contexte international particulier et d'une politique économique précise. Si le contexte échappe en partie à la responsabilité de l'exécutif français, il doit aujourd'hui s'expliquer en revanche sur la politique imprévoyante conduite depuis plus d'un an. Les 15 milliards de TEPA ont été décidés alors que les analyses d'une crise à venir existaient déjà...

Il est trop facile d'en appeler, maintenant que la crise est là, à "l'unité nationale". De se réfugier dans une habile communication ; la gauche est sommée de faire taire ses critiques et de se rallier aux pyromanes d'hier pour combattre l'incendie.

C'est évidemment inacceptable.

Qui depuis des années maintenant, tient un langage constant en faveur de la régulation, du maintien d'un contrôle de la puissance publique sur les marchés ?

Qui a tenté de mettre en garde avec constance contre les dangers de la déréglementation ?

Qui dénonce depuis longtemps le mythe économique de "l'autorégulation" des marchés ?


Qui proposait la possibilité de recourir de manière ciblée à des "nationalisations temporaires" en cas de risques économiques majeurs ?

Le Parti socialiste, que l'on disait dépassé sur le terrain des idées, ne tient pas avec la crise financière et économique sa revanche. Quand on fait de la politique, on ne souhaite pas la crise à son pays pour démontrer que l'on avait raison contre l'idéologie dominante. Mais toute crise est porteuse de remises en question et d'opportunités de rebond.

La gauche n'acceptera pas de se laisser berner par la droite maintenant que la crise est là. L'éthique de responsabilité impose au gouvernement de répondre devant les Français de ses choix. Ces choix, la gauche ne les aurait pas fait. Voilà la vérité. L'"unité nationale" réclamée par Fillon n'a aucun sens en la matière. En France, la droite est majoritaire dans toutes les institutions de la République ; la situation politique n'est donc nullement comparable avec celle prévalant aux Etats-Unis.

Ce qu'il faut au pays, ce n'est pas l'unité nationale mais un débat national.Et ensuite, assumer ses choix politiques!!

La gauche doit rappeler avec force la pertinence de son discours. Les propositions du PS pour sortir la France de la crise ou l'en protéger sont prêtes.

1- créer un fonds de garantie des prêts permettant l’accès au crédit des PME et des ménages afin d’assurer leur rôle de distribution de liquidités à l’ensemble de l’économie.

2- soutenir l’investissement privé comme public, en modulant l’impôt sur les sociétés selon que le bénéfice est réinvesti ou que le bénéfice est distribué aux actionnaires.

Il est temps de rétablir certaines vérités politiques. Au milieu d'autres poncifs largement alimentés par les médias, la gauche et la droite seraient aujourd'hui devenus un clivage dépassé, entend-on trop souvent. C'est faux. Cette crise en est un puissant révélateur.

Je vous laisse juge et comptable des responsabilités. Mais juste pour rappel, et alors que la crise des "subprimes" a révélé toutes les perversités du système immobilier américain, voici ce qu'écrivait le très inspiré candidat Sarkozy en avril 2007 (abécédaire des propositions):

"Les ménages français sont aujourd’hui les moins endettés d'Europe. Or, une économie qui ne s'endette pas suffisamment, c'est une économie qui ne croit pas en l'avenir, qui doute de ses atouts, qui a peur du lendemain. C'est pour cette raison que je souhaite développer le crédit hypothécaire pour les ménages et que l'État intervienne pour garantir l'accès au crédit des personnes malades.
Je propose que ceux qui ont des rémunérations modestes puissent garantir leur emprunt par la valeur de leur logement.
Il faut réformer le crédit hypothécaire. Si le recours à l’hypothèque était plus facile, les banques se focaliseraient moins sur la capacité personnelle de remboursement de l’emprunteur et plus sur la valeur du bien hypothéqué. Ceci profiterait alors directement à tous ceux dont les revenus fluctuent, comme les intérimaires et de nombreux indépendants".