13.2.06

Plutôt que la mise au pas de l’Afrique, penser enfin la mise au pot des riches du Nord.


Une confession d’entrée en forme de prise de conscience, j’ai souvent tourné en dérision les personnes, de gauche ou non, qui essayaient de changer notre regard sur l’Afrique. J’ai eu tort. Ces jeunes bénévoles défendant de grandes idées, de belles idées, comme la générosité ou la solidarité internationale méritent mieux que mon cynisme. Penser un développement solidaire est aussi urgent que de penser un développement durable. Ce ne doit plus être une question subsidiaire, en marge des problèmes de flux migratoires ou de défense de la francophonie. Ce ne peut plus être une question laissée aux seuls alter mondialistes et tiers-mondistes. Pourquoi les partis de gouvernement doivent-ils s’en saisir rapidement ?


Première raison. Les pays de l’Union européenne et de l’espace Schengen en particulier sont confrontés aujourd’hui à une gestion problématique des flux migratoires. Les images d’immigrés clandestins de Lampedusa ou plus proche de nous, ceux du centre de rétention de Calais, doivent conduire à proposer des solutions beaucoup plus ambitieuses que de simples barbelés ou même la coordination des polices européennes. C’est à sa racine qu’il faut attaquer le problème, c’est-à-dire en aidant les pays d’Afrique à sortir de l’extrême pauvreté. Deux contradictions sont traditionnellement avancées : 1) l’aide de l’Union européenne est déjà très importante 2) l’Afrique manque d’une élite responsable et offre une multitude d’exemples de gâchis ou de corruption. Cela ne doit pas conduire à laisser les choses en l’état. L’UE devrait accroître sa coopération avec l’Afrique et l’aider à développer ses infrastructures. La jeunesse africaine doit être la cible à garder en tête, c’est elle que l’UE doit viser à travers sa politique d’aide à l’Afrique. Créer sur place des moyens d’encourager l’intelligence avec des universités et des pôles de recherche. Donner à la future génération des chances de s’en sortir. Je me souviens de la phrase de cette jeune ivoirienne invitée au sommet de la francophonie qui s’est tenu en fin d’année dernière : « Si vous ne vous occupez pas de la jeunesse, elle s’occupera de vous »…

Deuxième raison. Le développement économique de l’Afrique peut nous être profitable. Nous ne pouvons pas continuer, au nom de la seule francophonie, d’une politique étrangère de prestige, à financer l’Afrique en pure perte. Il nous faut sortir l’Afrique de la pauvreté pour booster notre propre dynamique. Comment ne pas voir que l’Afrique avec son énorme réservoir de ressources, à la fois humaines et en matières premières, peut être un formidable « dopant » pour l’économie communautaire ?

Le développement solidaire, nouvelle manière d’envisager l’économie et la mondialisation, devra être au cœur des projets politiques en construction. La solidarité n’est pas seulement une exigence morale, c’est un formidable réservoir de croissance, une philosophie de développement économique, aussi efficace que durable.

Disons le clairement, avoir des voisins plus riches, plus sûrs, donc mieux dans leurs propres frontières, ce serait une tranquilité et un sérieux atout pour la France et l'UE !

5 commentaires:

Anonyme a dit…

La question de l'aide au développement de l'Afrique est bien évidemment une question essentielle. Elle se situe de fait dans les objectifs du millénaire de l'onu, ce qui a entraîné en quelque sorte une priorité sur l'agenda politique.

C'est pourquoi l'aide européenne est déjà trés importante envers l'Afrique au travers de programmes trés variés.

Ces programmes sont bien souvent tournés en direction de la jeunesse, de la formation et surtout essaient, au maximum, de ne pas se transformer en néo colonialisme mais bien en une aide au développement.

La France a une politique de coopération internationale avec l'Afrique relativement importante et privilégiée. Le budget de la coop s'éléve à 2.2 milliards d'euros dont 4/5° recourent à l'aide publqiue au développement dans les pays de la Zone de Solidarité Prioritaire. Ce sont des centaines d'experts techniques qui sillonent le continent africain dans le but de former, tous les jours des jeunes africains dans des domaines forts variés. Ce sont plus de 20 000 bourses d'études et de stages qui sont données à des étudiants et de jeunes professionnels étrangers.

Tout cela pour dire qu'ile xiste une action française et européenne en Afrique. Certes des enjeux économiques ralentissent peut être l'aide au développement, mais il ne faut pas oublier le travail de milliers de personnes, qui chaque jour, essaient de contribuer à cette fameuse aide au développement, avec les moyens qu'ils ont.

Sans compter qu'il ne faut pas croire qu'il est toujours facile de travailler et d'aider certains pays/ certaines zones géographiques / certaines administrations, ou que certains refusent une certaine aide.
Si l'on prend l'exemple de la lutte contre la corruption en Afrique, qui est pourtant un facteur essentiel au bon développement économique d'un pays, il apparait qu'il est trés difficile d'obtenir une volonté politique de certains gouvernements.

la politique étrangère de la France n'est donc pas seulement une politique de prestige. Que cela soit clair.

Nicolas Vignolles a dit…

Tu as bien raison de rappeler combien la France s'engage dans l'aide à l'Afrique, y compris en moyens humains! C'est un fait et j'aurais dû insister encore davantage dessus.

Toutefois mon papier mettait en garde contre deux arguments souvent avancés pour ne pas aller au-delà de ce qui est fait aujourd'hui :
1)l'aide est déjà conséquente 2)les élites africaines ne sont pas à la hauteur...

Mon propos consiste juste à dire qu'au-delà de ces constats, la situation de l'Afrique, seul continent à régresser régulièrement au-niveau de l'indice de développement humain (IDH), doit nous conduire à intensifier l'effort. Un effort qui devrait être en tête des priorités de la PESC et du projet européen.

Anonyme a dit…

C'est toute la question....

Comment apporter une aide plus "directe" car il faut bien avouer que parfois elle a tendance à se perdre dans des méandres administratifs..., en bref comment sortir l'Afrique de cette situation intolérable.

il est par ailleurs tout à fait vrai que les élites n'ont pas toujours été bien formées...
Je vous recommande donc chers lecteurs de ce merveilleux blog de réflexion, un roman assez sympa sur la formation des jeunes femmes africaines au Cameroun dans les années 50; L'Antilope Blanche, par Valentine Goby, chez gallimard/.

Nicolas Vignolles a dit…

Je te promet de lire Valentine Goby, une fois terminé le " C'était François Miterrand " de Jacques Attali...

Nicolas Vignolles a dit…

Une très bonne tribune de DSK dans le Fig du 20 février:

http://www.blogdsk.net/dsk/files/
tribune_le_figaro_20_fvrier_2006.doc