18.7.07

Quand la droite baisse la garde !


Le 10 juillet, la présentation du projet de loi TEPA a été l'occasion pour la Ministre de l'économie et des finances, Christine Lagarde, de renouer avec un ton que l'on avait opportunément choisi de délaisser depuis bien longtemps à droite.
Christine avait décidé de nous expliquer l'économie et le travail, du haut de sa tribune, forte de sa connaissance parfaite du monde du travail français, forte aussi de sa connaissance fine des difficultés de certains types de travaux pénibles. Elle, la mondaine, qui faisait l'essentiel de sa carrière outre-atlantique chez Baker & Mc Kenzie, venait expliquer aux petits députés, comment ça marche le travail ! Même l'UMP n'en est pas revenue !
Car la leçon de Lagarde aurait pu être argumentée, solidement bâtie autour d'exemples économiques pertinents, étayée de références européennes éclairantes... En fait de cela, rien ou presque : une leçon de conservatisme et la résurgence de la vieille vision d'une vieille droite dont on se rend compte, en grattant un peu, qu'elle n'était pas partie si loin en vérité....
Extraits à savourer pour les amoureux d'envolées philosophico-politiques :

"Reconsidérer le travail, c’est rompre avec une tradition de mépris qui trouve sa source dans l’Ancien Régime, quand les nobles avaient défense de s’adonner au commerce. La Révolution Française n’a pas mis fin à cette attitude. On la retrouve au XIXè siècle chez de nombreux auteurs : Paul Lafargue, dans son livre Le droit à la paresse, recommande à l’homme de ne travailler que trois heures par jour, et de passer le reste du temps à « fainéanter et bombancer ». Le dernier avatar de ce droit à la paresse, c’est, dans les années 90, le mythe post-industriel de la « fin du travail » : l’homme pourrait, illusion suprême, être définitivement remplacé par des machines et des ordinateurs. La loi des trente-cinq heures est l’ultime expression de cette tendance historique à considérer le travail comme une servitude. "

Et Lagarde de nous citer Confucius, après Mirabeau et Tocqueville ( sans doute fallait-il convoquer tous ces auteurs pour masquer les réalités concrètes d'un projet de loi à la fois très couteux et très hasardeux):

"Choisissez un travail que vous aimez,
et vous n'aurez pas à travailler un seul jour"...

C'est beau...J'en pleurs...Quelle éloquence cette Lagarde avec son carré Hermès!
Comme l'a justement écrit le canard Enchaîné: "Toutes ces subtilités ont échappé à la femme de ménage ou à la caissière de supermarché".

8 commentaires:

Nicolas Vignolles a dit…

Mais où est donc passée la main droite sur Ambidextre ? Dédaigne t-elle le débat politique, désormais repue de ces victoires électorales récentes, réfugiée dans un triomphalisme béat et stérile...?

Méchante, elle veut plus débattre avec nous la main droite...

мΛж a dit…

Je crois pas que la caissiere de supermarche ou la femme de menage soit celles a qui s'addresse le message. Il s'addresse a une generation de jeunes plein de desillusions qui se demandent si le travail ca sera mieux que d'enchainer un doctorat apres un master en 7 ans...

Oui, la France a besoin qu'on repete ce message encore et encore. Mon passage favori (je ne cite pas mot a mot): "La France est un peuple de penseurs. La preuve, on a des theories sur tout. Il faut maintenant que les Francais s'arretent de penser, et se mettent a agir!".

Depuis l'autre cote de l'Atlantique, dans le pays du pragmatisme, ou bien - trop - souvent on agit avant de penser, et ou bien rarement on s'arrete pour regarder ce qui est accompli, ce qui reste a faire, et donc prend le temps de la reflection (y compris en terme de politique etrangere ;-), il me semble que c'est le bon message. Il faut un juste milieu. Reflechir c'est bien, reflechir avant d'agir c'est mieux. Ou pour etre un peu grossier (mais jamais vulgaire): "France, prends tes couilles en bandouillere et sors toi les doigts du cul"

Nicolas Vignolles a dit…

c'est bien les clichés, en plus c'est pratique! les Français sont des fainéants, on les entretient depuis très longtemps dans cette illusion, patati patata...
La réalité, c'est que le véritable probleme de la France, c'est moins le temps de travail que le taux d'emploi! tous les économistes dignes de ce nom le savent. Si on fait bosser les 23-30 ans et les + 55ans, malgré les 35h, on aurait 1,5 point de croissance en plus! c'est autre chose que le discours débile de Lagarde, completement dogmatique. Depuis quand la droite est-elle parvenue à redonner une croissance forte à la France ?

Et la dépense publique, les cadeaux fiscaux sans visée économique sans ambition industrielle, c'est qui ? C'est la droite!

La priorité c'est de développer l'économie de la connaissance, encourager réellement le travail en posant la VRAIE QUESTION DU PARTAGE DE LA RICHESSE DANS L'ENTREPRISE, c'est enfin, l'allègement de la fiscalité de TPME et PME qui viennent de se créer afin de les encourager et de leur permettre d'éclore!

Il faut se servir de la ondialisation comme d'un levier formidable en encourageant nos boites, en leur facilitant la tache MAIS OU EST L'AMBITION ECONOMIQUE DANS LE PAQUET FISCAL ? c'est le bouclier fiscal qui crée de l'emploi ? C'est la déduction des emprunts immobiliers qui fait la France de propriétaires?

Vous êtes encore victimes de la politique de poudre aux yeux de Sarko, l'avocat.

Mais passées les vapeurs de l'été, l'automne viendra...et les premiers constats seront tirés.

Anonyme a dit…

Moi j'adore aussi, pour en rajouter une couche, les super mesures citées par Mme Lagarde quand on lui demande ce que fait le gouvernement pour les familles les moins favorisées: le cadeau fiscal pour l'accès à la propriété (mais pas sûr que ça marche pour une caravane), les heures sup mieux payées (trop bien quand on se bat pour ne serait-ce qu'un temps plein), l'abaisement des droits de succession (la mesure ne concernant que les plus gros héritages, ça fait une belle jambe aux familles populaires...)


Force est de constater que malgré "l'ouverture", la droite prend bel et bien des mesures de droite...

pauline a dit…

A croire que les intellectuels lisent ce blog :

a lire dans libé d'aujourd'hui :

Dans l'édition de lundi du journal «International Herald tribune», Bernard-Henry Lévy et Alain Finkielkraut raillent les propos de la ministre des Finances Christine Lagarde et les slogans du chef de l'Etat.
Par Arnaud Vaulerin
LIBERATION.FR : lundi 23 juillet 2007

Est-ce le nouveau slogan gouvernemental? Après le «travailler plus pour gagner plus», il faudrait également «travailler plus et penser moins». L’invitation n’a pas échappé au quotidien International Herald Tribune qui, lundi, dans un long article en page 4, se penche sur la nouvelle feuille de route de l’équipe Sarkozy. Et titre: «Travailler, ne pas penser» . Et la fait commenter par des intellectuels français.

Le quotidien anglophone s’est intéressé aux propos de la ministre des Finances, Christine Lagarde. La semaine dernière, celle-ci avait déclaré à l’Assemblée que la «France est un pays qui pense. J’aimerais vous dire: assez pensé maintenant, retroussons nos manches», rappelle le Herald Tribune. Cependant, sous la plume d’Elaine Sciolino, le quotidien souligne qu’en France, «pays qui a produit les Lumières», la «pensée a perdu de son cachet dans le gouvernement du Président Sarkozy».

«Le nouveau président lui-même a cultivé cette image de non-intellectuel», estime le Herald. Le journal reprend les propos du chef de l’Etat à la télévision le mois dernier: «Je ne suis pas un théoricien. Oh, je ne suis pas un intellectuel! Je suis quelqu’un de concret!»

Le message ne convainc pas les intellectuels. «Ce dédain pour la réflexion est peut-être allé trop loin», estime Elaine Sciolino qui a interrogé le «plus clinquant des philisophes-journalistes», Bernard-Henry Lévy. «C’est le genre de chose que vous pouvez entendre dans des conversations de café, de la part d’abrutis qui boivent trop», déclare BHL dans le Herald. «A ma connaissance, c’est la première fois dans l’histoire moderne de la France qu’un ministre ose débiter ce genre de phrases. Je suis pro-Américain, pour le marché, j’aurais donc pu voter pour Nicolas Sarkozy mais cette tendance anti-intellectuelle est une des raisons pour laquelle je ne l’ai pas fait.»

BHL, qui a écrit un livre sur le voyage de Tocqueville aux Etats-Unis, précise que la ministre, qui a invoqué Tocqueville dans son discours, a été «trop sélective» dans ces citations du philosophe du XIXe siècle. «Il lui a suggéré de relire les œuvres complètes. Sur son temps libre», raille le Herald Tribune.

Alain Finkielkraut, l’autre intellectuel convoqué, n’est guère plus amène avec la vulgate sarkozienne. «Quelle absurdité de dire que l’on devrait penser moins, assène-t-il. Si vous avez la chance de consacrer votre vie à la pensée, vous travaillez en permanence, même dans votre sommeil.»

Avec ironie, le quotidien souligne toutefois que «Sarkozy n’est pas un nain intellectuel. Ses discours de campagne étaient truffés de citations de grands penseurs français». Manière de dire que le divorce n’est pas encore consommé entre le nouveau pouvoir et le monde des idées.


http://www.liberation.fr/actualite/politiques/268533.FR.php

Nicolas Vignolles a dit…

Intéressant Fantomette et Pauline.
Je suis sidéré par Sarkozy et le populisme de ce gouvernement. Oui oui, populisme! et même anti-intellectualisme primaire.
Depuis quand la pensée a t-elle freiné l'action en France ?

Sarkozy n'existe que dans la simplification. Il lui faut simplifier les problèmes qui se posent au Français, pour pouvoir utiliser ensuite son "parler vrai", et balancer ses annonces tonitruantes et ses slogans publicitaires.


Quand je pense à Lagarde qui cite 4 auteurs français dans son discours dont Mirabeau et Tocqueville et finit par dire que "la France pense trop", je me dis qu'on tient là un sacré gouvernement...

мΛж a dit…

Vous parlez d'anti-intellectualisme primaire mais vous faites preuve d'anti-sarkozysme primaire. Il n'a encore rien fait, attendez les mesures, et critiquez par la suite. Elu il y a moins de deux mois, on le critique sur les memes lignes, populisme (royal etait bien loin de tout ca!), manicheisme, publicitarisme...

Et puis entre nous: Levy et Finkielkraut, quels intellectuels!

Nicolas Vignolles a dit…

Sans doute y a t-il effectivement de ma part, un peu d'anti-sarkozysme primaire, je te le concède volontiers.

Mais tout de même, la session extra du Parlement qui se terminera le 3 août a déjà permis à ce gouvernement de faire passer ces premiers textes et donc ces premières réformes CONCRETES. Ce n'est donc pas dans dix ans qu'il s'agira de juger, si l'on estime que ces meusres ne vont pas dans le bon sens. Le débat, c'et maintenant qu'il faut l'avoir.

Le PJL "travail, emploi et pouvr d'achat" est passé. Bilan: la programmation de 13 milliards de dépenses dont le financement n'est qu'hypothétique car calé sur l'espoir d'une croissance de 2,5%...!! et dont les effets escomptés sont d'abord un allégement des impôts pour les plus aisés et non la relance de l'économie...ça au moins on peut juger puisque c'est inscrit dans un texte qui vient de devenir loi!

Ni Jean Arthuis ni Philiphe Seguin ni Bruxelles ne partagent l'analyse économique de Sarkozy et l'annonce d'un "choc fiscal".

Le PJL récidive est une calamité. Mettre en prison des mineurs ne résoudra rien. Nos prisons sont vieilles et surpeuplées. Nous sommes régulièrement sanctionnés par la Cour européennes des droits de l'homme à acuse de l'état déplorable de nos prisons. Tous les spécialistes prônent des mesures dès le premier acte délictueux mais s'accordent à dire que la prison est INADAPTEE et la pire des écoles en matière de récidive. Où est le pragmatisme là ? C'est de la politique de droite débile, dogmatique, qui vise à faire plaisir dans les campagnes...précisemnt là où on refuse la construction de nouvelles prisons...

Le PJL sur les universités auraient pu etre une vraie réforme. D'ailleurs Hollande avait prévenu que l'opposition serait constructive et que la gauche était prete a voté POUR le PJL.
La réforme s'attache surtout à changer la gouvernance des universités en donnant plus de pouvoir et d'autonomie aux présidents et CA. Mais la priorité absolue, c'est débloquer des crédits colossaux pour créer des campus dignes de ce nom!!! DE LA TUNE POUR REMETTRE NOS UNIVERSITES AU NIVEAU DES STANDARDS INTERNATIONAUX DU XXI ème sièce!! Or la réforme, qui ne sera effective qu'en 2012...ne sera abondée financièrement qu'à partir de 2012...

La présidence Sarkozy, c'est un savant dosage : un peu de poudre de perlinpinpin, un peu de compassion, beaucoup de médias et beaucoup d'opportunisme caractérisé par la recherche de "coups" comme le traité simplifié qui ne sera vraisemblablement pas adopté à la prochaine CIG, la libération des infirmières bulgares (qui doit beacoup au travail de De Villepin, Douste Blazy, Barroso et à l'intervention financière du Quatar), etc, etc...

Sarkozy, c'est l'affaiblissemnt progressive de la majsté du politique. Les Français ont besoin aussi de grandeur. Or Sarkozy rabaisse la fonction présidentielle en s'agitant et en galvaudant la voix du Président.